Conte égyptien

Le roi Khoufouî et les magiciens

 Ce "roman", issu de contes, encore partiel (manque le début), conservé à Berlin, est considéré comme le plus long ayant été conçu en Égypte. On situe ses origines durant la troisième dynastie, à savoir environ 2500 ans avant notre ère. Les filiations semblent comporter des erreurs ce qui montre les libertés prises par le conteur et le scribe à leur suite. On note immédiatement une parenté avec Les Mille et une Nuits.

La Majesté du roi des deux Égyptes Khoufoui, à la voix juste, dit : « Qu'on présente à la majesté du roi Zasiri, à la voix juste, une offrande de mille pains, cent cruches de bières, un bœuf, deux godets d'encens, et qu'on fasse donner une galette, une pinte de bière, une ration de viande, un godet d'encens pour l'homme au rouleau en chef... car j'ai vu la preuve de sa science. » Et l'on fit ce que Sa Majesté avait ordonné.

Lors le fils royal Khâfrîya se leva pour parler et il dit : « Je vais faire connaître à Ta Majesté un prodige qui arriva au temps de ton père, le roi Nabka (lire « ancêtre »), à la voix juste, une fois qu'il s'était rendu au temple de Phtah, maître d'Ankhoutaouî. »

« Or, un jour que Sa majesté était allée au temple de Phtah, maître d'Ankhoutaouî et que Sa Majesté faisait visite à la maison du scribe, premier lecteur, Oubaou-anir avec sa suite, la femme du premier lecteur, Oubaou-anir vit un vassal de ceux qui étaient derrière le roi : [dès l'heure qu'elle l'aperçut, elle ne sut plus l'endroit du monde où elle était. Elle lui envoya sa servante qui était auprès d'elle, pour lui dire : « Viens que nous reposions ensemble, une heure durant ; mets tes vêtements de fête. »] elle lui fit porter une caisse pleine de beaux vêtements, et lui vint avec sa servante à l'endroit où elle était. Or, quand des jours eurent passé sur cela, comme le premier lecteur Oubaoui-anir avait un kiosque au Lac d'Oubaou-anir, le vassal dit à la femme d'Oubaoui-anir : « Il y a le kiosque au Lac d'Oubaoui-anir ; s'il te plaît, nous y prendrons un petit moment. » Lors la femme d'Oubaoui-anir envoya dire au majordome qui avait charge du Lac : « Fais préparer le kiosque qui est au Lac. »

Il fit comme elle avait dit et elle y demeura, buvant avec le vassal jusqu'à ce que le soleil se couchât. Et quand le soir fut venu, il descendit dans le Lac pour se baigner et la servante était avec lui, et le majordome sut ce qui se passait entre le vassal et la femme d'Oubaoui-anir. Et quand la terre se fut éclairée et qu'un second jour fut, le majordome alla trouver le premier lecteur Oubaoui-anir et lui conta ces choses que ce vassal avait faites dans le kiosque avec sa femme. Quand le premier lecteur Oubaoui-anir sut ces choses qui s'étaient passées dans son kiosque, il dit au majordome : « Apporte-moi ma cassette en bois d'ébène incrusté de vermeil qui contient mon grimoire. » Quand le majordome l'eut apportée, il modela un crocodile de cire, long de sept pouces, il récita sur lui ce qu'il récita de son grimoire, il lui dit : « Quand ce vassal viendra se baigner dans mon lac, alors entraîne-le au fond de l'eau. » Il donna le crocodile au majordome et lui dit : « Dès que le vassal sera descendu dans le Lac, selon sa coutume de chaque jour, jettes-y le crocodile derrière lui. » Le majordome alla donc et il prit le crocodile de cire avec lui. Le femme d'Oubaoui-anir envoya au majordome qui avait charge du Lac et elle lui dit : « Fais préparer le kiosque qui est au bord du Lac, car voici, je viens y séjourner. » Le kiosque fut muni de toutes les bonnes choses : on y vint et on se divertit avec le vassal. Quand ce fut le temps du soir, le vassal alla, selon sa coutume de chaque jour, et le majordome jeta le crocodile de cire à l'eau derrière lui ; le crocodile se changea en un crocodile de sept coudées, il saisit le vassal, il l'emporta sous l'eau. Or, le premier lecteur Oubaoui-anir demeura sept jours avec Sa Majesté du roi de la Haute et de la Basse Égypte Nabka, à la voix juste, tandis que le vassal était dans l'eau sans respirer. Mais, après que les sept jours furent révolus, quand le roi de la Haute et de la Basse Égypte Nabka, à la voix juste, alla et qu'il se rendit au temple, le premier lecteur Oubaoui-anir se présenta devant lui et il lui dit : « Plaise Ta Majesté venir et voir le prodige qui s'est produit au temps de Ta Majesté au sujet d'un vassal. » Sa majesté alla donc avec le premier lecteur Oubaoui-anir. Oubaoui-anir dit au crocodile : « Apporte le vassal hors de l'eau. » Le crocodile sortit et apporta le vassal hors de l'eau. Le premier lecteur Oubaoui-anir dit : « Qu'il s'arrête ! » et il le conjura, il le fit s'arrêter devant le roi. Lors La Majesté du roi de la Haute et de la Basse Égypte Nabka, à la voix juse, dit : « De grâce, ce crocodile est terrifiant ! » Oubaoui-anir se baissa, il saisit le crocodile de cire. Le premier lecteur Oubaoui-anir raconta à La Majesté du roi de la Haute et de la Basse Égypte Nabka, à la voix juste, ce que le vassal avait fait dans sa maison avec sa femme. Sa Majesté dit au crocodile : « Prends, toi, ce qui est tien. » Le crocodile plongea au fond du Lac et l'on n'a plus su ce qu'il advint du vassal et de lui. La Majesté de la Haute et de la Basse Égypte, à la voix juste, fit conduire la femme d'Oubaoui-anir au côté nord du palais ; on la brûla et on jeta ses cendres au fleuve. Voici, c'est là le prodige qui arriva au temps de ton père, le roi de la Haute et de la Basse Égypte Nabka, à la voix juste, et qui est de ceux qu'opéra le premier lecteur Oubaoui-anir.

LA Majesté du roi Khoufouî, à la voix juste, dit donc : « Qu'on présente à la majesté du roi Nabka, à la voix juste, une offrande de mille pains, cent cruches de bière, un bœuf, deux godets d'encens, puis qu'on fasse donner une galette , une pinte de bière, un godet d'encens pour le premier lecteur Oubaoui-anir , car j'ai vu la preuve de sa science. » Et l'on fit ce que Sa Majesté avait ordonné.

Lors le fils royal Khâfrîya se leva pour parler et il dit : « Je vais faire connaître à Ta Majesté un prodige qui arriva au temps de ton père Sanafrouî, à lavoix juste, et qui est de ceux qu'opérait hier le premier lecteur Zazamânkhou.

Un jour que le roi Sanafrouî, à la voix juste, s'ennuyait, Sa Majesté assembla la maison du roi à la voix juste, afin de lui chercher quelque chose qui lui allégeât le cœur. Comme on ne trouvait rien, il dit : « Courez et qu'on m’amène le premier lecteur Zazamânkhou, et on lui amena sur l'heure. Sa Majesté lui dit : «  Zazamânkhou, mon frère, j'ai assemblé la maison du roi, à la voix juste, afin qu'on cherchât quelque chose qui m'allégeât le cœur, mais je n'ai trouvé rien. » Zazamânkhou lui dit : « Daigne Ta Majesté se rendre au Lac de Pharaon, à la voix juste, et se faire armer une barque avec toutes les belles filles du Harem royal. » (commence alors un autre conte).

Les contes populaires de l'Egypte ancienne.Textes choisis, traduits de l'ancien Égyptien et annotés par Gaston Maspero, Libretto, 2016.